Partie 4
Comment animer une escape room
Table des matières
Vous souhaitez imprimer ce guide ou le lire hors ligne ?
Dans un escape game, le maître du jeu a un rôle majeur. Même s’il n’a pas participé à la création de l’escape, il doit en connaître chaque rouage. Tout au long de la séance, il devra être attentif, dynamique et rigoureux. En gardant à l’esprit l’ensemble de ces préconisations, il veillera au bon déroulement du jeu.
4.1 Lignes directrices et briefing
La mission principale du maître du jeu est de mener à bien la partie. Pour cela, l’animateur doit mettre en œuvre ses capacités d’observation et d’écoute. Lorsque les élèves jouent, l’enseignant doit les accompagner dans leur quête de résolution de la mission. Les interventions doivent être ajustées : il ne faut donner que les informations essentielles.
Attention, une posture de contrôle pourrait également freiner la dynamique de jeu et gêner les joueurs dans leur partie. Il est nécessaire de trouver le bon équilibre en acceptant que les élèves trouvent parfois une stratégie différente pour résoudre une énigme. Certaines énigmes peuvent s’avérer parfois trop complexes pour les joueurs.
À la fin de la partie, l’animateur doit prendre le temps de débriefer avec les élèves pendant quinze minutes minimum. Il est important de reconstituer le jeu en leur faisant prendre conscience des compétences et des notions qui ont été mises en jeu. Il faut mettre en valeur leurs succès et échanger sur les blocages auxquels ils se sont confrontés. Enfin, le maître du jeu doit penser à écouter leurs réactions pour améliorer l’animation suivante ou parfaire la création d’un prochain jeu.
Chaque partie de jeu est différente et évolue selon la personnalité de l’animateur. Vivre un escape game en tant que joueur, peut aider à identifier les attentes et les émotions que l’on peut avoir lorsqu’on le joue.
4.2 Supervision et sécurité
Dans une escape room traditionnelle, le maître du jeu est à l’extérieur de la pièce dans laquelle se déroule la partie. Ici, il sera dans la salle avec les joueurs. L’animateur peut s’installer dans un coin de la pièce afin de les observer sans les gêner. Il est également possible de communiquer avec eux en utilisant un écran interposé (talkie-walkie ; micro ; écran, etc.). Excepté pour les aider (en fonction du temps, de l’avancement des équipes) ou régler les conflits qui pourraient se déclarer dans les groupes, le maître du jeu n’intervient pas.
Lors de l’introduction de la partie, la formulation de la mission doit être soignée : afin de renforcer la quête, on réduira au maximum le nombre de consignes. Il est également possible, selon le degré de complexité du jeu et l’autonomie des joueurs, de ne pas fixer de règles.
Les élèves sont sous la responsabilité de l’animateur. Après leur avoir expliqué les règles du jeu, il doit leur rappeler les impératifs de sécurité à observer au cours de la partie : « ne pas utiliser la force physique, ne pas se faufiler n’importe où, ne pas grimper sur le mobilier et ne pas tenter de démonter des objets ou des meubles. » Le maître du jeu ne doit pas à hésiter à se faire seconder par un autre adulte pour surveiller le bon déroulement de la partie. Il peut également anticiper cette étape en distribuant au préalable à chaque élève une feuille de route énonçant les règles de sécurité et de fonctionnement.
Une fois les élèves placés dans l’intrigue et les règles de fonctionnement et de sécurité rappelées, l’animateur doit informer les élèves du temps qui leur est imparti pour résoudre les énigmes et mener à bien la mission.
4.3 Différents types d’aides pour différents objectifs
Les joueurs doivent mobiliser des compétences diverses liées au travail en équipe comme la collaboration, l’échange, l’entraide et l’écoute. Ils doivent également utiliser des compétences de recherche comme la déduction ou le décryptage. Les élèves sont acteurs de leurs apprentissages. Ainsi, le maître du jeu doit observer les actions et les modes de fonctionnement des joueurs pour en tirer profit.
Dès le départ, l’animateur doit rappeler que cet escape game a été mis en place afin de mettre à profit des apprentissages abordés en classe. Ils ont les capacités de résoudre les énigmes en utilisant leurs connaissances. La création de sous-groupes, dans une optique de division de l’ensemble des énigmes, leur permettra d’avancer plus rapidement. Il doit insister sur le fait que chaque joueur et sous-groupe doit repasser derrière une énigme si elle n’est pas résolue. Une lecture différente des informations leur permettra d’ajuster leur réflexion et ainsi d’arriver à la fin du puzzle.
Il est nécessaire d’anticiper les blocages possibles. En fonction de la progression des équipes et du temps écoulé, l’enseignant peut donner des indices pour accélérer la réflexion ou ajouter du temps si les élèves n’ont pas fini. Attention, il ne s’agit pas de donner la solution, mais de donner des indices de degrés divers. Mais dans ce cas, il faut contextualiser cet ajout dans l’intrigue. Par exemple : l’animateur peut proposer une fiche pour comprendre un outil ; imaginer la possibilité d’« acheter » des indices avec une somme de départ (cela limite les demandes d’aide et favorise l’autonomie du groupe) ; penser que s’ils résolvent une énigme en un temps imparti, ils peuvent bénéficier d’un point bonus leur permettant d’avoir un joker sous la main en cas de coup dur.
4.4 Indices et conseils
À la différence d’une escape room traditionnelle où les joueurs sont enfermés dans une salle, les élèves doivent ici relever des indices cachés ou codés pour aller au bout de leur quête. Avant que la partie de jeu commence, le maître de jeu doit prendre le temps de les informer de l’expérience qu’ils vont vivre.
Un minimum d’instructions et une diversité des énigmes, tant dans le fond que dans la forme, sont donc importants pour encourager le travail en équipe. L’animateur doit également penser à approfondir le scénario en évitant un synopsis linéaire. Si chaque énigme se résout l’une après l’autre et à la suite, l’expérience de jeu sera plus faible. Le maître du jeu peut imaginer que ses élèves découvrent des indices pour une énigme à laquelle ils seront confrontés plus tard, qu’il s’agisse de codes, de clé ou même d’objets à utiliser.
Les puzzles doivent d’être énigmatique ou le jeu perd de son intérêt ! Il faut veiller à alterner les niveaux de difficulté tout en gardant à l’esprit qu’ils ne doivent être ni trop faciles (au risque de perdre l’engagement des élèves) ni trop difficiles. Pour parvenir au bout de la quête, toutes les énigmes doivent être résolues et comprises. Les élèves doivent se partager le travail en petits groupes en fonction des liens et affinités de chacun. Ils doivent collaborer en discutant, émettant des hypothèses, en expérimentant et parfois en commettant des erreurs.
Il ne faut pas excessivement aider les joueurs. Mais ne pas non plus les aider du tout. Cela les ralentirait et pourrait entraîner une non-résolution finale de la quête, et provoquer une perte de confiance. Le maître de jeu doit les observer, les guider, les accompagner et évaluer s’il doit réajuster le jeu.
4.5 Gestion du temps
Si un cours traditionnel peut paraître parfois long à certains élèves, le format de l’escape game peut offrir l’opportunité de revoir ou d’aborder des notions à un rythme différent et de manière amusante. Pour atteindre leur objectif, les joueurs doivent parvenir à résoudre les énigmes et de fait, aller au bout de leur quête. Si un escape game traditionnel dure généralement une heure, le maître de jeu peut fixer le temps alloué au jeu en fonction du créneau horaire disponible ou de la concentration de ses élèves. En tout état de cause, il doit informer les élèves au début de chaque partie du temps qui leur est imparti.
Le jeu étant chronométré, l’animateur doit être attentif et réactif. Il ne doit pas hésiter à jouer sur le timing pour maîtriser l’énergie et l’excitation des joueurs. Si les élèves coincent sur certaines énigmes, l’animateur doit leur donner un coup de main en les attirant vers des indices ou en leur suggérant des pistes. Attention, chaque coup de pouce doit être donné au bon moment. La création d’un organigramme, qui reprend le scénario de jeu et donc les relations entre chaque énigme permettra de visualiser l’avancement des joueurs. C’est à l’animateur de juger s’il doit intervenir et quand, en tenant compte du temps de jeu, de la dynamique de jeu et des échanges entre les joueurs.
Il peut matérialiser les coups de pouce et donc les compter. L’utilisation de cartes avec un pouce, caché dans l’escape room ou offert à la demande par le maître du jeu, permettra de dédramatiser l’idée d’erreur et d’aller au-delà des blocages. Attention cependant à ne jamais donner la réponse ! Cela est contre-productif et augmentera de fait la déception des participants.
Enfin, il doit accepter de ne pas toujours tout maîtriser. S’il doit faire face à des imprévus, au rythme et au temps, il doit aussi laisser la place au hasard. Il est important de se rappeler qu’il s’agit d’un jeu et qu’il est important de laisser tomber la méthode et la technique.
4.6 Position de l’enseignant
L’apprentissage par le jeu est une question discutée depuis plusieurs années dans la pédagogie scolaire. Au-delà des jeux sur supports, l’essor des outils numériques mis à disposition dans les établissements scolaires demande de s’investir dans ce que l’on appelle les « serious game », dont font partie les escapes game. Les jeux ont toujours été liés aux apprentissages et en les utilisant, les élèves modifient leurs comportements pour apprendre. Ils contribuent ainsi davantage au développement de leurs connaissances.
Animer un escape game demande de lâcher prise sur son rôle d’enseignant. Le professeur prend la posture de maître du jeu, il surveille l’avancement de la partie, rappelle le temps qui s’écoule et accompagne en donnant un coup de pouce lorsqu’une énigme bloque le groupe. L’incertitude du jeu, qui évolue entre autres selon les difficultés des énigmes et du temps qui s’écoule, demande à l’enseignant de lâcher prise. L’enseignant doit accepter qu’il n’ait pas le contrôle, faire confiance à ses élèves et à sa propre capacité à surmonter les difficultés.
Cependant, l’animateur ne doit pas oublier l’objectif de cette activité : l’apprentissage. Il est difficile pour le professeur de percevoir les apports de chaque joueur (raisonnement, connaissances et compétences), car il s’agit d’un jeu de collaboration et de coopération. Il doit rappeler dès le départ aux participants que si l’escape game est un jeu, de véritables objectifs d’apprentissage se cachent derrière les énigmes.
Comme pour toute activité ludique organisée en classe, une phase de débriefing doit être organisée en fin de partie. Que ce soit lors de la conception de l’escape game ou de la phase du jeu, le professeur doit avoir en tête l’exploitation pédagogique de l’après-jeu. Cette phase permet de reprendre chaque énigme et ainsi faire émerger les stratégies de résolutions et les compétences et connaissances à retenir. De fait, même ceux qui n’ont pas été impliqués dans la résolution des puzzles peuvent comprendre. Cela fournira également peut-être au professeur des pistes d’amélioration de son jeu. Il est recommandé d’accompagner cette phase d’une trace écrite, s’il n’y en avait pas pendant l’activité, pour permettre aux élèves de garder à l’esprit les nouvelles notions acquises.
Enfin, l’enseignant ne doit pas oublier de recueillir les émotions des élèves et s’assurer que personne n’a mal vécu l’expérience. La collaboration et la communication au sein du groupe doivent être discutées : il faut demander aux participants quelles étapes ils ont préférées et pourquoi, même chose en cas contraire. Il faut également demander ce qu’ils ont le mieux appris et pour quelles raisons.
4.7 Préparation et organisation de la classe
Le maître du jeu doit connaître de manière approfondie le scénario, même si ce n’est pas lui qui l’a conçu. Il est le seul à avoir connaissance de tous les éléments du puzzle : la localisation des énigmes, les solutions et les pièges. En connaissant précisément le déroulement du scénario, il garantit le bon déroulement des opérations. Il ne doit pas hésiter à garder en main l’organigramme du jeu, ce qui lui permettra de réagir rapidement en cas de difficulté.
Avant le début de la mission, il doit vérifier que l’équipement est prêt, que rien ne manque et que les outils numériques, s’il y en a, sont bien configurés. La salle dans laquelle se déroulera l’escape game doit être disponible au minimum 15 minutes avant le début du jeu. Il ne doit pas oublier d’enlever tout équipement inutile qui pourrait interférer avec le jeu.
La classe doit être préparée : les élèves savent ce qu’est un escape game. Il doit leur faire savoir qu’au-delà du jeu et derrière les énigmes, ils sont là pour approfondir des connaissances acquises en classe.
La première étape consiste à rédiger un scénario pour leur entrée dans le jeu. L’animateur doit présenter la trame de l’histoire dans laquelle les joueurs sont transportés en mettant en avant l’intrigue. Où sont-ils ? Pour quelles raisons ? Quel est le but à atteindre ? Tout cela en soutenant l’ambiance du jeu. C’est à eux de déterminer comment ils vont s’y prendre pour accomplir la quête. Il n’est pas nécessaire d’être acteur, mais pour que l’expérience ait plus de possibilités de se réaliser, la présentation de l’animateur pourrait se dérouler comme s’il n’était pas un professeur, mais un personnage impliqué dans l’aventure !
Pendant la partie, le maître du jeu peut aiguiller les participants en les encourageant, les alertant sur leurs oublis ou leur donner des coups de pouce s’ils sont bloqués. Cependant, il ne doit pas oublier de laisser aux participants la liberté de s’approprier l’espace, de découvrir le matériel, de collecter des indices et de s’interroger afin d’amorcer une coopération. Enfin, il doit être attentif aux relations existantes et à celles qui se créent. Il doit s’adapter à la personnalité des élèves : encourager les plus hésitants à participer. De même, l’animateur ne doit pas hésiter à tempérer les joueurs qui seront trop investis dans le jeu. Chacun doit pouvoir participer comme il le souhaite. Et il faudra accepter que certains soient réfractaires à ce jeu.
4.8 Conseils aux enseignants pour surmonter les difficultés éventuelles
Pour qu’un escape game se déroule sans difficulté, dix élèves au maximum doivent participer à l’expérience. L’espace consacré au jeu et au nombre d’énigmes doit être accessible à tous. Les joueurs doivent pouvoir se déplacer librement dans l’espace et participer à une ou plusieurs énigmes. Il est conseillé de réaliser cette activité en classe de demi-groupe, avec des équipes de sept à neuf joueurs. L’enseignant peut imaginer, avec un autre professeur, l’animation de deux escapes games en parallèle, ce qui augmentera la dynamique du jeu. Les joueurs seront confrontés à un double enjeu : résoudre les énigmes dans un temps donné et plus rapidement que l’autre équipe.
Tout au long du jeu, il faut préserver le dynamisme de l’équipe et un rythme soutenu. Pour cela, il faut indiquer les minutes qui s’écoulent et motiver les troupes au besoin. Le maître du jeu permet la coopération et la collaboration entre les joueurs. Il faut demander aux équipes de se séparer et de créer des sous-équipes pour résoudre les puzzles séparément. De même, il faut leur rappeler la nécessité de communiquer entre elles et les guider, si nécessaire, pour rétablir les liens.
La scénarisation du jeu est importante : plus le jeu est linéaire (la solution de la première énigme donne accès à la suivante, etc.), moins le groupe se divisera les énigmes. Tous les joueurs suivront les énigmes en même temps. Outre le fait de se perdre dans la même question, l’intérêt du jeu serait moindre. Pour éviter cela, l’enseignant doit planifier le jeu avec plusieurs zones d’activité dès le début.
Une activité scolaire classique est accompagnée d’une instruction. Ici, il est conseillé d’ajouter le moins de consignes possible. Si l’enseignant a du mal à se détacher des activités classiques, il peut imaginer des consignes qui ne seront données aux élèves que s’ils ont des difficultés à résoudre les énigmes.
Enfin, il peut être difficile, selon certaines disciplines du programme, d’imaginer des énigmes. Pour faire face à cela, l’enseignant peut créer un escape game pluridisciplinaire ou l’utiliser comme un outil de révision de plusieurs parties du programme scolaire.
Il y a un aspect que nous n’avons pas encore abordé dans ce chapitre, mais qui implique une préparation et une explication sur l’animation d’une escape room. Comment être capable de préparer et d’intégrer différents types de profils d’élèves ? C’est de cela qu’il sera question dans le chapitre suivant.